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L’Europe accuse Amazon de pratiques anti-concurrentielles

Cette fois l’Union européenne ne mâche pas ses mots : elle adresse un sévère avertissement à Amazon, qui fausserait la concurrence. La société jouerait un double jeu. 

« La Commission reproche à Amazon d’utiliser systématiquement les données commerciales non publiques des vendeurs indépendants actifs sur sa place de marché au bénéfice de sa propre activité de vente au détail, qui est en concurrence directe avec celle de ces vendeurs tiers. » Dès les premières phrases du communiqué, publié ce mardi 10 novembre, le message est clair : Bruxelles soupçonne Amazon de se servir illégalement des informations qu’elle détient sur les commerçants qui utilisent sa plate-forme pour écraser toute concurrence. Pour l’instant, il ne s’agit que d’une espèce de gros avertissement.

« À titre préliminaire »

La société de Jeff Bezos est rappelée à l’ordre par une « communication des griefs », c’est-à-dire que ce ne sont que les conclusions préliminaires de l’enquête ouverte en juillet 2019 et qu’Amazon en est officiellement informé. Mais si l’intuition de la Commission est confirmée, cela « serait contraire à l’article 102 du traité sur le fonctionnement de l’UE (TFUE) qui interdit les abus de position dominante sur le marché ». Néanmoins, Bruxelles rappelle que « l’envoi d’une communication des griefs ne préjuge pas de l’issue d’une enquête ». 

Au passage, la Commission annonce qu’elle va ouvrir une deuxième enquête « en matière de pratiques anticoncurrentielles au sujet des pratiques commerciales d’Amazon qui pourraient favoriser artificiellement ses propres offres de vente au détail et les offres des vendeurs de sa place de marché qui utilisent les services logistiques et de livraison d’Amazon (le service “Expédié par Amazon” – “Fulfilment by Amazon” en anglais – et les “vendeurs FBA”).» En clair, sur la logistique et la livraison, Amazon fausserait également les règles du jeu, dans l’optique de favoriser ses services. 

Sollicité par nos services, Amazon a tenu à rappeler son « désaccord avec les affirmations préliminaires de la Commission européenne. Nous mettrons tout en œuvre pour que celle-ci ait une parfaite compréhension des faits. Amazon représente moins de 1 % du commerce de détail mondial, et il existe des distributeurs bien plus importants dans chacun des pays où nous opérons. Aucune entreprise ne se soucie davantage des petites entreprises, ou n’a fait plus pour les soutenir au cours des deux dernières décennies, qu’Amazon »*. 

Néanmoins, la plus grand place de e-commerce est régulièrement accusée par les vendeurs tiers, les associations militantes, les institutions de jouer sur son double statut : de vendeur et du support de vente. 

Triplement du bénéfice net 

De plus, en ce moment, Amazon est particulièrement critiqué pour avoir profité de la crise sanitaire, qui contraint de nombreux commerces à fermer leurs portes, tandis que la vente en ligne bat des records. La société américaine a annoncé un triplement de son bénéfice net, à 6,3 milliards de dollars au troisième trimestre 2020, une envolée des recettes tirées de ses articles vendus en ligne de 38 %, tandis que les ventes des marchands tiers utilisant sa plate-forme ont augmenté de 55 %.

« Nous devons veiller à ce que les plates-formes jouant un double rôle et détenant un pouvoir de marché, comme Amazon, ne faussent pas la concurrence. […] Les conditions de concurrence sur la plate-forme d’Amazon doivent également être équitables », a expliqué Margrethe Vestager, vice-présidente exécutive chargée de la politique de concurrence de la Commission européenne. Avec elle, l’institution a fait de l’encadrement des géants de l’Internet une priorité. D’ici la fin de l’année, la Commission doit ainsi présenter de nouvelles mesures drastiques avec le Digital Services Act pour limiter le pouvoir des Gafa. Parmi elles, l’obligation de partager leurs données avec des entreprises concurrentes. 

Sources : Commission européenne et AFP
* L’article a été mis à jour avec la réaction d’Amazon le 10/11/2020 à 16h53.

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Marion Simon-Rainaud